Près de 300 personnes d’origine comorienne dorment le long d’une route depuis dimanche à Mayotte. Ces familles, installées pour certaines depuis plusieurs années sur l’île, ont été expulsées de leurs habitations par un groupe de Mahorais, les habitants de Mayotte, qui les accusent notamment de vol. Un nouvel épisode dans la vague de violences que subissent depuis plusieurs mois les personnes d’origine étrangère dans ce département français d’outre-mer.
Selon la presse locale, près de cinquante maisons de fortune, appelées bangas, ont été détruites, laissant plusieurs familles à la rue dimanche 8 mai dans la ville de Choungui, au sud de l’île. Ces personnes sont originaires de Grande Comore ou d’Anjouan, deux îles de l’archipel des Comores, à l’ouest de Mayotte dans l’océan Indien. L’archipel des Comores comprend quatre îles : trois constituent un État indépendant, et la quatrième, Mayotte, est un département français, qui attire les familles comoriennes pour des raisons économiques ou médicales, les hôpitaux comoriens étant souvent dans un état catastrophique.
Une maison détruite à Choungui. Photo : Gauthier Dupraz.
Sans perspective de relogement, ces familles ont installé un campement improvisé à l’entrée du village.
« Les maisons ont été cassées et pillées, une petite fille a été blessée à l’œil »
Mohamed Moigni
Mohamed Moigni et l’un des responsables de l’association de la communauté comorienne du sud de Mayotte, créée en février 2016 après une expulsion similaire à Tsimkoura, un village à 5 km de Choungui. Il coordonne l’organisation du camp.
Je me suis rendu ici à Choungui dimanche après-midi. Les familles m’ont assuré qu’elles avaient été expulsées par une centaine de Mahorais du même village, dimanche matin. Les maisons ont été cassées et pillées. Une petite fille a été blessée à l’œil. La raison ? On les accuse d’occuper des terrains illégalement et d’être des voleurs. En réalité, la plupart des Comoriens de Choungui travaillent pour des Mahorais. Ils sont dans la construction, font des ménages…
Les habitants expulsés organisent un camp le long de la route, à l’entrée du village. Photo envoyée par un Observateur.
Avec mon association, nous avons aidé les populations expulsées à installer un camp à 50 mètres du village. Les forces de l’ordre entourent le campement pour éviter d’autres incidents. Il y a beaucoup d’enfants, dont certains en bas âge. Nous avons essayé de récupérer des bâches pour faire des tentes, mais cela fait deux jours que les familles dorment à même le sol et ici, il y a beaucoup de moustiques. Il faut absolument trouver une autre solution mais les autorités locales nous disent qu’elles n’en ont pas.
Des enfants dans le camp improvisé. Photo envoyée par un Observateur.
Et au lieu de s’occuper de reloger tout le monde ou de punir les auteurs de cette expulsion forcée, les forces de l’ordre ont fait venir ce matin la police des frontières qui a embarqué une cinquantaine de familles en situation irrégulière ! Les familles qui restent sont elles en situation régulière. Certains enfants sont nés à Mayotte et d’ailleurs ils sont quasiment tous scolarisés ici, même si depuis lundi ils n’y vont plus. Tout le monde reste dans le camp par peur des représailles.
Certains Mahorais n’approuvent pas ce genre d’expulsion et nous avons pu constater une certaine solidarité : plusieurs personnes apportent des vivres depuis lundi.
Le camp installé à l’entrée de Choungui depuis dimanche. Photo envoyée par l’un de nos Observateurs.
Contacté par France 24, le maire de la ville assure : « La mairie n’a pas de solution de relogement : c’est à la préfecture d’en trouver une. Je condamne l’intervention des habitants, mais je rappelle que ces familles squattaient des terrains. Par ailleurs, la ville a connu une recrudescence des vols, ce qui explique que les habitants se fassent justice eux-mêmes. »
Dès le mois d’avril, l’association française Cimade, qui défend les droits des personnes étrangères, a pointé du doigt la multiplication des violences faites aux familles d’origines comoriennes sur l’île depuis le début de l’année 2016.
« Il y a un discours ambiant xénophobe, les étrangers sont accusés d’être à l’origine de la délinquance sur l’île »
Le monde va mal
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